Résumé :
L'atelier Manivelle est un atelier de production artistique en Bretagne dédié à la création d'art contemporain. Pierre Galopin, artiste peintre, est à l'initiative de ce lieu. Il ouvre ses portes en novembre 2014 pour une nouvelle résidence avec comme invité le sculpteur Pascal Jounier-Trémelo. Le réalisateur Patrice Paillard est convié à ce temps de résidence artistique.
"La langue des prisonniers" est le cinéma-théâtre de ce lieu et de ses personnages du XXIème siècle : le peintre, le sculpteur et le réalisateur.
Idée :
Si la pensée théologique baroque du XVIIème siècle et l'époque psychologisante au tournant du XXème siècle semble révolue, l'existence de l'artiste, dans sa pensée et son acte actuel vit toujours.
À travers un commentaire, tiré de l'œuvre de Bertolt Brecht Grand peur et misère du III Reich illustrant l'infusion lente et l'acceptation progressive des idéologies totalitaires dans le quotidien des Allemands sous le régime nazi - une grande analogie réflexive se donne à voir :
Cette courte histoire sordide met en évidence une liberté de choix habilement annihilée par un acte pernicieux d'agressivité, révélant un véritable processus de hiérarchisation et de domination sociale et historique. Ces idéologies politiques d'appauvrissement des conduites et des comportements - toujours tentées de resurgir au cours des siècles - apparaissent dans ce document comme fondamentalement inconciliables avec ce qui caractérise une pratique artistique libre.
Ce texte, lu et emprunté au domaine théâtral, permet donc par contraste et analogie un éveil à la compréhension fine de la nécessité vitale d'un choix libre.
"La langue des prisonniers" illustre l'incompatibilité d'un dictat social et politique avec l'existence des artistes créateurs.
C'est un cinéma documentaire de résistance.
Note d'intention :
À la fois oeuvre de résistance, cinéma théâtral et film poétique, "La langue des prisonniers" confronte stratégie politique et engagement dans la création artistique.
Dans ce documentaire deux questions ont guidé la réalisation : Comment s'éveiller à la compréhension fine de l'existence d'un choix libre ? Comment faire émerger audiovisuellement le cycle naturel et la création technique à travers la notion de la durée ?
"Après les lectures de R. Steiner, B. Brecht et J.B. Poquelin, la mutation historique des notions de forme et matière au XVIIéme siècle vers les notions de corps et d'esprit discutées au XXème siècle me sont apparues comme une perspective qui devait "sous-tenir" le documentaire.
L'extrait lu du texte de Brecht a été la pierre angulaire de la réalisation car cette histoire - témoignant de rapports sociaux particuliers - permet de lier entres elles les notions de corps et d'esprit, de matière et de forme et elle permet également de montrer l'artiste dans son rapport particulier à la liberté".
C'est une immersion pour le spectateur dans l'atelier de production artistique avec une donnée sensible qui est celle du temps cyclique biologique qui traverse chacun. C'est une narration engagée qui permet de faire émerger audiovisuellement la liberté d'agir dans la création et l'esprit de la durée qui 'circule' infatigablement à travers les siècles. C'est l'illustration d'un temps vivant et de la mise en place de solutions cinématographiques pour le révéler à l'image.
Fiche de traitement :
"La langue des prisonniers" est une forme courte de documentaire s'appuyant sur les propositions visuelles du cinéma muet.
Si la «colle» du média vidéo est celle des interviews, des commentaires et des productions verbales, ce document audiovisuel original propose, occultant la production sémantique de la parole, une narration symbolique aux nombreuses métaphores et analogies vivantes. C'est un récit en tension sur la seule force des images et de leurs successions.
La magie du cinéma muet, par son silence et la succession des images, à cette vertu : elle permet au spectateur de véritablement penser.
Dans ce cinéma documentaire tourné dans l'idée du huis clos, le réalisateur, plongé au cœur de l'histoire, nous donne sa vision particulière de la matrice naturelle. Il propose un cinéma poétique et engagé ; une narration en filigrane convoquant un spectateur actif dans la compréhension narrative des images et de leurs pouvoirs analogiques.
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